Au même titre que la malaria, la filariose lymphatique est une maladie endémique en Haïti. Mais elle ne retient pas pourtant l’attention, sauf lors des campagnes nationales de distribution de médicaments. Cette négligence, probablement due au fait que la filariose lymphatique ne menace pas la vie, participe néanmoins de la souffrance de beaucoup de personnes.

Généralités : définition, causes et transmission

La filariose lymphatique fait partie d’un groupe de maladies dues à des vers (les filaires) transmis par des moustiques. Première maladie reconnue à transmission vectorielle (c’est-à-dire pouvant être transmise d’un sujet à un autre par des organismes, les vecteurs), il s’agit d’une maladie parasitaire chronique très invalidante signalée dès l’Antiquité. En Haïti, le filaire provoquant la maladie est le Wuchereria bancrofti, mais il existe aussi le Brugia malayi et le Brugia timori.

 Nous retrouvons ces filaires uniquement chez l’homme, mais, à certaines exceptions près, les grands mammifères en sont aussi porteurs.

Le filaire adulte, fin comme un fil,  se loge dans les vaisseaux et les ganglions lymphatiques, ces derniers étant le lieu de production des anticorps et des lymphocytes qui combattent les infections. Le filaire vit en moyenne quinze ans. Toutefois, il produit au cours de son existence de petits vers (microfilaires) qui siègent dans les vaisseaux situés près de la peau. Et ce sont ces microfilaires que le moustique prend lors d’une piqûre d’un porteur infecté pour ensuite le transmettre à un individu sain à la prochaine piqûre. En général, ces microfilaires passent dans le sang la nuit et vivent environ trois semaines. A noter que s’il n’y a pas de microfilaires dans le sang prélevé lors d’une piqûre, il n’y aura pas de moustiques infectés, donc pas de propagation de la maladie.

Symptômes

Certains individus porteurs de filaires ne présentent aucun symptôme.  Sinon, certaines manifestations seront observées.

Manifestations cliniques aiguës (au cours de la première année suivant l’infestation)

  • Fièvre élevée
  • Maux de tête
  • Insomnie
  • Douleurs au niveau de l’aine (entre les cuisses, de part et d’autre des organes génitaux)
  • Accidents génitaux aigus
  • Inflammation des vaisseaux lymphatiques (lymphangite)
  • Adénites aiguës (inflammation des ganglions lymphatiques)
  • Orchite (inflammation des testicules)

Manifestations chroniques

  • Hydrocèle (« maklouklou »)
  • Orchiépididymite chronique (inflammation d’un testicule {orchite} et d’un épididyme {épididymite})
  • Urines blanchâtres
  • Adénopathies (l’hypertrophie d’un ou de plusieurs ganglions lymphatiques)
  • Varices lymphatiques (dilatation des vaisseaux lymphatiques)
  • œdèmes des membres (gonflement de la peau et des tissus)
  • Eléphantiasis (gonflement et épaississement de la peau et des tissus)

 Conséquences

Mettant rarement la vie en danger, la filariose lymphatique provoque néanmoins des incapacités invalidantes chroniques et non agréables à la vue, des problèmes rénaux, des difficultés financières ainsi que de la stigmatisation sociale.

 Prévention

Certaines stratégies permettent de lutter contre la filariose lymphatique.

Stratégies individuelles

  • Utiliser des moustiquaires et des insecticides
  • Eviter la stagnation des eaux (pneus, rigoles, vases, bidons…)
  • Porter de vêtements longs, amples et de couleur claire
  • Prendre régulière des médicaments lors des traitements de masse

Stratégies collectives

  • Campagnes d’éradication des moustiques (fumigation…)
  • Campagnes nationale de chimiothérapie préventive : comprimés de diéthyl-carbamazine (DEC) et d’albendazole, éventuellement associés à l’ivermectine, distribués en masse une à deux fois par an dans les régions endémiques comme la nôtre
  • Elimination des stockages de déchets en plein agglomérat urbain et à ciel ouvert
  • Lutte contre les moustiques:
    • nettoyage et entretien rigoureux des canaux
    • épandage d’insecticides larvicides.

Emmanuel JOSEPH

Etudiant en médecine et en psychologie (UEH)

Village Santé