La stigmatisation tue, pas le VIH

Avez-vous déjà entendu parler ne serait-ce qu’une fois de ce virus que l’on appelle VIH, responsable de la maladie que nous dénommons SIDA ? Avez-vous déjà contracté des maladies comme l’herpès ? La varicelle ? Le zona ? Ou connaissez-vous des proches qui en ont souffert ? Ces maladies ont toutes un dénominateur commun : elles sont issues de virus. Des organismes si minuscules qu’il nous est impossible de les voir à l’œil nu.
Maintenant, voyons une autre chose : Vous êtes-vous déjà assis à côté d’un asthmatique ? Avez-vous déjà côtoyé un diabétique ou donné la main à un hypertendu ? Permettriez-vous à votre enfant de jouer avec un cancéreux ? Pourquoi alors refusez-vous de vous asseoir aux côtés d’une personne qui a le VIH ? Pourquoi évitez-vous de lui donner une accolade ? De travailler, de manger, de partager une blague avec elle ? Pourquoi ?
C’est assurément parce que vous ignorez tout de la maladie, ou encore, parce que circulent tellement de mythes autour de celle-ci que vos idées préconçues et décousues ont pris le dessus. Mais que vous l’ignoriez ou pas, vous stigmatisez cette personne-là. Quand dans une salle de classe, vous êtes mis à l’écart à cause de votre couleur de peau, quand vous n’avez pas d’amis à cause de vos convictions religieuses, quand on vous refuse du travail à cause de votre sexe ou de votre orientation sexuelle ou qu’on vous catalogue à cause d’une maladie, cela s’appelle de la stigmatisation.
En d’autres termes, toute action ou toute parole qui transforment une caractéristique, un comportement, une déficience, une maladie, une incapacité ou un handicap d’une personne en une marque négative ou d’infériorité est une stigmatisation.
Dans le temps, les groupes ou catégories de personnes qui ont été victimes de stigmatisation sont nombreux. D’abord, il y a eu les femmes, ensuite les noirs, les personnes avec capacités physiques et mentales réduites, les personnes de petite taille (précédemment appelées « nains »), pour ne citer que ceux-là. Le genre humain a reconnu ses faiblesses et a admis ses torts. Notre couleur de peau, notre genre, nos maladies ne font pas de nous des sous-hommes. Mais semble-t-il que certains individus peinent encore à comprendre.
Mettre à l’écart une personne atteinte d’une maladie n’est pas acceptable. L’humilier, le priver du droit de travailler, ne pas lui serrer la main, l’injurier, lui interdire l’accès à un lieu public n’est tout simplement pas admissible. Le diabétique, l’hypertendu, la personne souffrant d’hyper cholestérol, l’unijambiste, le dépressif, le cardiaque, l’obèse, l’asthmatique ont tous droit à votre respect. La personne vivant avec le VIH aussi.
Pourquoi dites-vous ? Parce que le VIH/Sida est une maladie comme toutes les autres. Une maladie avec laquelle on vit comme l’hypertension. Une maladie qui demande un traitement à vie comme le diabète. Une maladie qui affaiblit notre système immunitaire comme les cancers. Une maladie dont on peut mourir comme…toutes les autres.
N’en déplaise à plusieurs d’entre vous, souffrir d’une maladie quelle qu’elle soit n’a rien d’humiliant. Ce sont nos préjugés, nos fausses idées et notre ignorance qui transforment des maladies en un fardeau lourd à porter par ceux qui en souffrent.
Si vous changez votre regard sur le VIH, vous changerez du même coup la vie des milliers de personnes qui en sont atteintes. C’est un grand geste, et il ne vous coute absolument rien. Vous attendez donc quoi pour agir ?
Dr. Cynthia Jean-Louis
Médecin généraliste