Comment venir en aide aux enfants en danger en Haïti ?

La maltraitance infantile est définie par la Convention Internationale relative aux Droits de l’enfant adoptée par l’ONU en 1989 comme «toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d’abandon et de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle» infligés à une personne de moins de dix-huit ans. Elle a de graves conséquences sur la santé de l’enfant, sa survie, sa dignité et son développement. L’Organisation Mondiale de la Santé estime que chaque année dans le monde, 41 000 enfants de moins de 15 ans sont victimes d’homicides et ce chiffre ne reflète pas tout l’ampleur du phénomène car il ne tient pas compte des décès consécutifs à des mauvais traitements ou liés au suicide de certaines victimes.
Depuis de nombreuses années, la psychologie a démontré qu’un enfant a besoin dès la naissance pour se développer de façon harmonieuse, d’établir avec son entourage des liens d’attachement stables, sécurisants, affectueux et stimulants (Cf La théorie de l’attachement, John Bowlby, 1959). Les neurosciences ont révélé plus tard, grâce à l’imagerie cérébrale, que le cerveau d’un enfant ne se trouvant pas dans ces conditions idéales et soumis au stress extrême que génère la maltraitance, se développe mal et peu. Comment reconnaître un enfant souffrant de ce fléau ? Et comment lui venir en aide ?
Les différentes formes de maltraitance infantile
Il existe plusieurs formes de maltraitance qui touchent l’enfant dans des sphères différentes de son existence :
- La maltraitance physique désigne tout acte qui porte atteinte à son corps. Il peut s’agir de gestes violents, de coups portés sur l’enfant avec (fouet, matinèt, rigwaz, règle, brindille, ceinturon, chaussure) ou sans objets (gifles, coups de poing, de pied).
- La maltraitance verbale et psychologique concerne les messages adressés à l’enfant et qui l’affectent sur un plan émotionnel et psychologique. Il peut s’agir de mots ou de phrases dévalorisant l’enfant car attaquant son physique (« tu es laid-e » ») ou sa personnalité (« tu es bête ou sot-te ;, « Tu es mauvais-e » ; « tu ne vaux rien » ; » tu seras toujours nul-le ») ; de menaces (« je vais te tuer») ou de chantages (« si tu n’es pas sage, j’arrête de t’aimer» ou « je t’abandonnerai »). Cette forme de violence peut aussi se passer de mots et se traduire par des comportements comme lui démontrer peu ou pas d’affection physique, éviter de lui faire des compliments ou lui dire des mots gentils ; ne lui accorder aucune attention et le traiter avec indifférence.
- Les abus sexuels sont des actes sexuels perpétrés sur l’enfant et qui peuvent prendre la forme d’attouchements réalisés sur lui (lui toucher les parties génitales) ou au bénéfice de l’agresseur (forcer l’enfant à le toucher) ou de rapports sexuels imposés (viol). Ils peuvent être de nature incestueuse lorsque l’agresseur en question est une personne de la famille.
- La négligence parentale : Il y a négligence lorsque les parents, ou toute autre personne responsable de l’enfant, ne satisfont pas à ses besoins physiques, émotionnels ou psychologiques. Ces adultes ne lui fournissent pas d’alimentation adéquate, de soins physiques touchant à l’hygiène corporelle, de supervision sécuritaire ou de soutien affectif.
- L’exploitation économique: à titre d’exemple, nous pouvons citer le cas des Restavèk qui est une forme d’esclavage moderne subi par des enfants en Haïti. Confiés par leurs familles pauvres à des familles plus nanties dans le but de leur offrir une scolarisation et un avenir meilleur, ils se retrouvent en réalité exploités en qualité de domestiques, surchargés de travail et victimes de violences physiques, verbales et parfois sexuelles. On compte 150 à 500 000 enfants « restavèk » dont la plupart sont des filles.
Où la détecter ?
Elle peut avoir lieu dans le foyer familial, dans une famille d’accueil, à l’école ou dans d’autres espaces fréquentés par l’enfant. Les signes de cette maltraitance peuvent se détecter à l’école, à la maison, dans un centre de santé ou à l’hôpital. En effet, un enfant peut se retrouver chez le médecin ou à l’hôpital à la suite de mauvais traitements ayant occasionné des blessures corporelles ou des problèmes de santé physique liés aux coups subis ou au stress vécu.
Très souvent, la cause de ces problèmes est dissimulée ou attribuée à un accident et en fonction du lieu où cette violence est commise. Il revient donc aux parents, au personnel de l’éducation ou aux professionnels de santé d’être vigilants et de reconnaître les signes de la maltraitance.
Comment la reconnaître ? Les signes et symptômes
Au niveau physique, on peut constater : des marques de coups, de brûlure, de morsure, des ecchymoses (bleus) sur son corps ou encore un retard dans son développement physique. S’il s’agit de violences sexuelles, on peut noter chez l’enfant une difficulté à marcher ou à s’asseoir.
Au niveau comportemental, l’enfant peut manifester une peur de l’adulte, la crainte d’une personne en particulier ou d’un membre de sa famille, un refus de rentrer chez soi. Dans les cas de violence sexuelle, l’enfant peut avoir une connaissance inappropriée pour son âge, d’actes sexuels ou un comportement hyper sexualisé c’est-à-dire très axé sur le sexe. L’enfant peut aussi présenter comme signes psychologiques, un fort sentiment d’angoisse, un repli sur soi, de l’agressivité envers elle/lui-même (se faire du mal) ou envers les autres, des symptômes dépressifs pouvant mener à des idées suicidaires et tentatives de suicide. Il peut aussi montrer un retard dans son développement affectif lui causant des difficultés relationnelles et intellectuel, générant des troubles d’apprentissage ou de rendement scolaire.
Faut-il la dénoncer?
Selon l’article 19 de la Convention internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) traité international adopté par l’Assemblée Générale des Nations Unies, le 20 novembre 1989 signée et ratifiée par Haïti en 1994 donc faisant office de loi nationale, l’Etat doit protéger l’enfant contre toutes les formes de mauvais traitements perpétrés par ses parents ou par toute autre personne à qui il est confié. La loi haïtienne attribue au commissaire du gouvernement et au professionnel de santé en particulier, le rôle de « protecteurs de l’enfant ». Ceci dit, le professionnel de santé qui reçoit un enfant et le soupçonne de subir de mauvais traitements a le devoir d’en informer les autorités compétentes, ce dans l’intérêt suprême de l’enfant.
Tous les citoyens sont tenus de signaler à l’Etat (à travers le bureau du Commissaire du gouvernement), ou institutions d’aide à l’enfance (tels que l’Institut du Bien-être social), les cas d’enfants maltraités. Refuser de les signaler, équivaut à commettre comme délit la « non-assistance à personne en danger ».
Les recours sociaux et légaux
Si vous êtes témoin de mauvais traitements infligés à un enfant (dans votre quartier, dans la rue, dans son école), si vous soupçonnez qu’un enfant est victime de maltraitance ou avez eu des confidences de sa part sur un vécu de ce type, vous pouvez contacter les institutions suivantes :
- Parquet de Port-au-Prince « Femmes et enfants en danger »- Tel : 3829-9000
- Institut du Bien-être Social (IBERS) –
- Centre d’appel d’urgence : 511 ou 133
- Bureau : 2816 1552/ 2816 1554/ 28161558 / 2816 1559
Références
- Convention internationale des Droits de l’Enfant (CIDE)
- OMS : Centre des médias : La maltraitance des enfants, site internet: http:// who.int
- Ministère des services de l’enfance et de la jeunesse, Ontario, Site internet : http://www.children.gov.on.ca
Cet article est très intéressant .Compliments ! Il y a tant d’enfants qui souffrent au sein même de leur famille et souvent c’est le secret,l’omerta.On prefere ne pas voir :sa pa gadem!
Article tres instructif.
Merci, nous ajoutons notre pierre dans le travail de lutte contre la maltraitance d’enfant en Haiti.