En Haïti, une grande partie de la population, longtemps confrontée à des difficultés d’accès aux soins de santé, ne bénéficie d’aucune forme de couverture du risque maladie. Ainsi, le diagnostic ou le dépistage biologique d’un certain nombre de maladies reste grandement dépendant de la mise en œuvre d’initiatives innovantes qui permettront à des millions d’Haïtiens d’être soignés sans trop s’endetter ou s’appauvrir davantage. Une des stratégies à considérer pourrait être des projets pilotes de mutuelles de santé (l’État, ONG, secteur privé, Coopératives) qui permettraient à beaucoup d’Haïtiens, grâce à des cotisations annuelles, trimestrielles ou mensuelles, d’accéder plus facilement aux soins de santé.

L’État, à travers le Ministère de la Santé publique et de la Population et d’autres ministères sectoriels, devrait conserver les acquis en matière d’accès universel aux soins et renforcer toutes les initiatives axées sur un programme de couverture maladie universelle, lequel doit être considéré comme une solution durable à promouvoir et à préserver.

En ce qui a trait aux maladies non transmissibles, les systèmes de santé des pays en voie de développement sont soumis à rude épreuve : une projection à l’horizon 2030 avance le chiffre inquiétant de près de 54% pour la charge totale de morbidité liée aux maladies non transmissibles (MNT) tels le diabète, les cancers, les maladies cardiovasculaires et respiratoires, l’obésité…

En effet, pour cerner plus largement la problématique des « maladies sous-diagnostiquées », nous devons orienter les projecteurs sur cette catégorie de maladies que l’on peut considérer à juste titre comme un problème de santé publique, voire un fleau sur lequel l’OMS a tiré la sonnette d’alarme en 2011 : les Maladies Non Transmissibles (MNT).

Selon l’OMS, chaque année près de 15 millions de personnes entre 30 et 69 ans décèdent d’une maladie non transmissible; plus de 80% de ces décès prématurés surviennent dans les pays en développement, et touchent de manière disproportionnée les plus pauvres et les plus défavorisés. Les données nationales disponibles à travers EMMUS VI montrent qu’Haïti n’est pas exempt de ce fléau (cf. tableau ci-dessous).

Les résultats rapportent les prévalences suivantes :

Maladies Femmes 35-64 ans Hommes 35-64 ans
Hypertension artérielle (˃140 mm Hg) 49.0% 37.9%
Diabète (≥ 6.5% HbA1C) 14.1% 8.2%
Obésité (˃ 30 IMC) 17.2 % 2.9%
Tumeurs 0.3% 0.1%
Cancer du col de l’utérus Des 11.4% ont effectué le test ; 3.9% résultat positif

Source : Résultats EMMUS VI- Haïti 2016-2017

Haïti devrait profiter de ce momentum mondial lié aux MNT à travers les 41 résolutions de la feuille de route de Montevideo 2018-2030 sur les maladies non transmissibles pour poser en profondeur et via une approche multisectorielle, les problèmes d’accès à la prévention et au dépistage à grande échelle des MNT.

Durant ces cinq dernières années, l’une des options majoritairement admises dans les pays à ressources limitées est l’implémentation d’un programme de Couverture Maladie Universelle.

La mise en œuvre d’un tel programme, avec pour porte d’entrée la prévention et la prise en charge des MNT, pourrait assurément à long terme nous mener vers une amélioration appréciable de la situation sanitaire de la population avec un impact certain sur les indices de développement durable.

Depuis quelques mois, le Ministère de la Santé publique et de la Population a emboîté le pas en lançant avec des partenaires nationaux et internationaux une campagne intitulée : « Caravane pour le Changement de comportement, la prévention et le dépistage de certaines maladies non transmissibles ».

La volonté politique, une nécessaire mobilisation de Ressources, l’accompagnement des partenaires techniques et financiers, la collaboration du secteur privé, le leadership éclairé du Ministère de la Santé publique et de la Population devraient contribuer à enrichir un tel programme.

 

Dr Lauré Adrien

Directeur Général Du MSPP